Pardonner

Pardonner

Attention ! hein, ou le petit Jésus va te punir.

Mais qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu pour ramasser toutes ces tuiles ? …

Ça, ma vieille, tu ne l’emporteras pas au paradis !

Et je ne sais combien d’expressions que l’on entend, comme celles-là, dans les conversations, pour parler de Dieu. Le Dieu-gendarme qui circule la matraque à la main, épiant les hommes pour cogner celui qui va faire un pas de travers ; le Dieu menaçant et vengeur qui ne supporte pas les faux pas et qui extermine tout ce qui se dresse sur son passage, tous ceux qui sont contre lui.

Il y a comme qui dirait un « stuut » entre ce Dieu-là et celui que nous révèle Jésus ; c’est à se demander si on a lu le même Evangile. Parce que quand j’entends les paraboles d’aujourd’hui, j’ai plutôt l’impression que le pécheur serait préféré à l’innocent, que, pour un peu, le juste pourrait être jaloux du traitement que Dieu apporte au pécheur.

Au départ du passage d’aujourd’hui, on a les scribes et les pharisiens qui font des reproches à Jésus : « Mais comment peux-tu aller vers ces gens-là, comment peux-tu aller manger chez des escrocs, des collabos de l’armée romaine, comment peux-tu te laisser approcher par des prostituées ?  Dieu n’a que faire de ces gens-là et il se chargera de les punir le temps venu ! »

C’est comme ça que la justice de Dieu était perçue: les pharisiens et les scribes transposaient en Dieu la justice des hommes.

Jésus vient alors leur révéler que la justice de Dieu n’est pas la justice des hommes, que son cœur est bien différent du nôtre. Il vient leur dire que Dieu ne se réjouit pas seulement devant celui qui est juste, mais aussi devant celui qui se convertit, il se réjouit lorsqu’un pécheur essaye de quitter sa vie de bâton de chaise pour vivre davantage selon la vie que Dieu lui propose.

En fait, il faut regarder Jésus entouré de tous « ces gens-là », comme nous le dirions, les voir venir écouter le seul homme en Israël qui n’a pas le moindre mépris pour eux. Ils viennent le voir et l’écouter, et leur surprise doit être grande de n’entendre aucun reproche sortir de sa bouche, juste un appel qui leur dit : « Tu peux faire mieux, tu dois faire mieux ».

Et Jésus raconte ses paraboles, non pas adressées aux pécheurs, mais aux scribes et aux pharisiens.

« Quel homme d’entre vous, s’il a cent brebis et qu’il en perd une, ne laisse les 99 autres dans le désert pour aller après celle qu’il a perdue jusqu’à ce qu’il la retrouve ? » Cet homme va faire des kilomètres, autant qu’il en faudra, jusqu’à ce qu’il la trouve, et lorsqu’il l’a trouvée, il est tout joyeux et la ramène sur ses épaules. Et plus encore, de retour chez lui, il appelle ses amis pour faire la fête, « Je l’ai retrouvée, ma brebis perdue, arrosons ça ! »

Cette parabole nous révèle d’abord qu’aucun homme n’est jamais abandonné par Dieu, personne n’est jamais définitivement perdu, puisque Dieu continue inlassablement à le rechercher. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il aime. Et plus encore, il ne se contente pas d’attendre qu’on revienne à lui, il part tout de suite en recherche !
« Ben oui, et alors ?… ».
Ben, c’est incroyable, chacun de nous, toute personne, a une valeur unique et inestimable aux yeux de Dieu. Et quand une personne l’abandonne, il continue à s’en préoccuper ; Dieu aime ceux qui ne l’aiment pas, il souffre parce qu’une seule de ses brebis lui donne du souci.

Cette bonne nouvelle de Jésus, nous la connaissons avec notre tête, mais si peu avec notre cœur ; on n’y croit pas vraiment à ce Dieu-là, il est trop bon …

Cette parabole nous révèle aussi une autre dimension de Dieu.

Jésus invite donc les justes entre guillemets à se réjouir avec le berger. Dieu m’invite à me réjouir avec lui, d’autant plus que la brebis perdue, c’est peut-être bien moi.

La joie de Dieu éclate quand quelqu’un qui est tombé très bas est regagné, et que le troupeau est à nouveau au complet.

« Vous êtes quand même de drôles d’amis de Dieu » devait leur dire Jésus ; « Pour un peu, vous diriez au berger : laisse-la se perdre, tu en as encore 99, ça suffit amplement ».  « Mais non » leur crie Jésus, « ne savez-vous pas que Dieu veut voir vivre chacun de ses enfants ? » Jésus vient donc leur révéler un autre visage de Dieu ; un Dieu qui pardonne comme il respire et qui appelle les hommes à se réjouir devant ce pardon qui se renouvelle sans cesse. Et mieux encore, il nous appelle à vivre nous aussi le pardon entre nous, comme il nous offre son pardon sans condition. Que cette bonne nouvelle de ce matin entre dans chacune de nos vies et nous pousse à accueillir ce pardon sans cesse offert.