Un intendant malhonnête

Un intendant malhonnête

Mais enfin, qu’est-ce que c’est que ça ! Voilà que ce Jésus est en train de louer cet intendant malhonnête. Encore une pièce à verser au dossier de son procès. En êtes-vous bien sûr ?

Reprenons notre histoire, mais deux mille ans plus tard.

Paul, manager financier, travaille chez Bruyères informatique, une petite PME en plein essor. Tout se passe très bien si ce n’est que depuis un an, Jacques, le PDG de la société, constate des « trous » inexplicables dans les comptes et, après enquête, il découvre que Paul détourne ni vu ni connu, quelques centaines d’euros chaque mois.

Dans la semaine qui suit, notre PDG convoque son manager financier : Paul, n’essayez pas de vous justifier, j’ai découvert vos magouilles. Je pourrais vous traduire en justice, mais je n’en ferai rien ; je vous donne trois mois pour demander votre démission et pour partir, sans indemnités, bien sûr.

 « Trois mois, trois mois pour faire face à cette nouvelle situation. Pas question pour moi d’aller chômer ou d’être jeté à la rue. Alors tant que j’en ai encore le temps, je vais me faire des amis pour retrouver du boulot après ».

Quoi de plus simple quand on a encore les comptes en main ?

Il s’en va alors rencontrer quelques personnes qui ont encore des factures à payer à la société pour leur proposer un petit geste: « Je connais vos difficultés financières actuelles, je vais vous faire une petite remise, pour vous donner un ballon d’oxygène. » Et puis, l’Evangile ne dit-il pas que l’on ne doit pas réclamer les dettes que l’on nous doit ? et le patron ne sera pas trop perdant, il vaut mieux qu’il retouche une partie des factures plutôt que ne rien retoucher du tout dans le cas où ces personnes tomberaient en faillite…

Mis au courant, le PDG, tout en désapprouvant la malhonnêteté de son comptable, ne put s’empêcher d’admirer son habileté. « Ah, si cet homme pouvait mettre ses talents au service du bien ! » Jésus ne pousse donc pas à la magouille, c’est bien mal le connaître que d’oser croire ça. Jésus est émerveillé devant l’habileté de l’intendant, devant la débrouillardise de Paul. Ils avaient tout perdu, mais ils sont arrivés à retomber sur leurs pattes. Finement jouer messieurs !

Et Jésus de nous dire : « Ah, si vous aviez autant d’habileté pour faire advenir le Royaume de Dieu, quel dommage que votre imagination et votre matière grise ne soient pas autant utilisées pour les bonnes causes ». « Vous inventez un tas d’astuces pour votre avenir immédiat, n’oubliez pas de préparer votre avenir plus lointain, votre vie éternelle ! » Parce que c’est là qu’est le souci majeur de Jésus : que chaque homme entre dans la vie éternelle ! Par comparaison, Jésus nous redit que l’argent n’est pas grand-chose à côté des demeures éternelles ! « De grâce, n’oubliez pas de vivre les priorités, n’oubliez pas le long terme ».

Mais Jésus ne condamne pas l’argent, il sait très bien qu’il est nécessaire pour les échanges. Le danger est qu’il ne serve plus dans les échanges, mais devienne une priorité en soi, il sait la menace de l’accumuler et d’en devenir l’esclave. Mon grand-père disait : « L’argent, un bon serviteur, mais un mauvais maître. » C’est ce que Jésus pourrait redire aujourd’hui. Il nous met en garde devant ce faux dieu.

Alors, soyez intelligent aussi pour préparer votre avenir éternel. Soyez plein d’habileté et d’astuces pour faire fructifier votre vie, vos talents, votre argent, vos avoirs, à long terme, à très long terme. L’argent est bien placé quand il aide à fabriquer de la joie, quand il permet d’aider un peuple à sortir de sa pauvreté, quand il aide un père ou une mère à subvenir aux besoins de sa famille, quand il me permet, pourquoi pas ? de vivre un temps de retraite, …

Deux, trois chiffres, même si ce n’est pas ma tasse de thé : Un avion de chasse mirage équivaut à un hôpital dans un pays du tiers-monde, le coût d’une année d’enseignement secondaire pour un jeune de la région des grands Lacs au Congo : 250 euros, soit un peu plus de 20 euros par mois ; prix d’une retraite, plus ou moins 45 euros par jour, le tiers de ça à Taizé pour un jeune ou un adulte.

Alors, intendant fidèle ou intendant désinvolte ?

Du temps bien investi n’est-ce pas aussi une visite chez une personne seule, malade ; du temps donné dans Saint-Vincent de Paul ou je ne sais quelle ASBL caritative, ou encore dans un service paroissial ; du temps pour réfléchir au comment donner aux gens l’envie de rencontrer Dieu, prendre le temps de rencontrer Dieu dans un cœur à cœur intime, ou en groupe,… ? On serait parfois effaré de voir le rapport qu’il y a entre notre temps donné et celui que l’on garde pour nous.

Alors, économe avisé ou économe dépassé ?

L’enjeu est de taille, nous dit Jésus, ce matin, il en va de votre vie, de votre avenir, faites donc preuve d’intelligence et d’habileté pour gérer ce que je vous ai confié. Mais n’oubliez pas de compter sur moi pour vous aider, je suis sur le chemin, avec vous, et je suis là pour vous guider et vous porter quand le chemin se fait trop difficile.